Trouvailles du mois #6
Une série qui a l'air chiante alors que non, un best-seller à lire surtout si vous êtes blanc·he, une nouvelle playlist mijotée pour les débuts de soirée, et quelques rendez-vous
OÙ SE RETROUVER DANS LES PROCHAINS JOURS ?
Déjà, venez donc nous rejoindre lundi soir (le 3 juin de 20h30 à 21h30) en ligne avec Vincent Edin, essayiste compétent et marrant, qui va nous expliquer comment on peut “sauver l’information” — d’abord en regardant en face le système médiatique : comment il est financé, structuré, relayé, et les problèmes démocratiques que cela pose… Et vous, quelles sont vos interrogations quant à votre façon de vous informer ? Est-ce que vous vous sentez perdu·es, las·ses, effrayé·es face aux infos ? On prend vos questions !

Pour les francilien·nes, le week-end prochain au festival We Love Green on ne fera pas que siroter de la bière bio devant les meilleurs groupes du moments, on pourra aussi assister à des conversations sérieuses — par exemple poser des questions à Amnesty International sur la situation à Gaza. En début de soirée dimanche 8 juin, dans l’émission de l’humoriste Swann Périssé “Y’a plus le temps”, on essaiera de rire et de réfléchir avec les autres invités.
Grenoblois·es ! Les 14 et 15 juin, c’est le “Temps des Féminismes”, un gros festival avec moult table-rondes, ateliers et événements — regardez-moi ce programme de haute volée ! (Y’a Vincent Edin aussi dedans d’ailleurs, qui va parler du backlash masculiniste)
Venez regarder un super film ! J’ai adoré “Bonjour l’Asile” qui réunit avec drôlerie et intelligence plusieurs sujets qui me passionnent : la vie en communauté auto-gérée, la lutte contre ceux qui ne pensent qu’au profit, et l’amitié féminine.
La réalisatrice, Judith Davis, organise quatre projections-débats au Saint André des Arts à Paris (6e). Je serai à celle du lundi 9 juin à 20h, venez donc ! Idéal pour un date ou des retrouvailles entre potes ! Vous inquiétez pas on sera sorti·es pour 22h.
Je prends quelques jours de vacances avec mes bonnes amies du “Gang du Flipper” (à la fin d’une soirée l’une d’entre nous a lancé les yeux brillants “vous aimez jouer au flipper?” et nous a traîné dans son bar préféré où on a enchaîné les parties). Je les aime tellement. Au bord de la piscine on s’entraîne à faire des corbeaux en écoutant du disco, on cherche nos animaux totems avec des pendules, on pleure de rire en racontant de consternants échanges professionnels (avec des types qui nous détestent d’être plus compétentes qu’eux). Parler de sujets très chargés (trauma, agression, violence systémique) ne nous empêche pas de rigoler beaucoup (voire nous y encourage?). J’aime bien mes amis, mais rien n’égale pour moi le plaisir de ces moments en non-mixité.
(et bien sûr on a déjà écouté cette chanson 8 fois — et hier soir on s’est enjaillées sur ce délicieux délirant vieux mash-up de DJ Zebra).
Et voici ce que je vous recommande dans tout ce qui m’a enthousiasmée ce mois-ci :
A VOIR - La 4e saison de la série “Parlement”
Une série télé qui se passe au Parlement Européen ?! Ça l’air d’être le pitch de la pire série possible, et c’est l’une de mes préférées. Un jeune assistant parlementaire, Samy, mignon mais empoté et ignorant découvre les us et coutumes du Parlement. Dans cette dernière saison il change d’institution pour entrer dans la redoutable Commission Européenne… C’est aussi addictif que The Office ou toute autre série qui se passe dans un lieu de travail, et en plus on apprend plein de trucs sur ces institutions (alors que tous les cours sur le sujet m’endormaient)
➡️ Parlement, à voir gratuitement sur France TV, 10x 25 min
A LIRE - L’autobiographie de Malcom X
L’autobiographie du leader des Black Panthers, ce mouvement révolutionnaire de libération afro-américain fait à mon avis partie des 100 livres indispensables à lire dans sa vie.
Je l’ai dévoré à 20 ans, quand j’étudiais aux Etats-Unis (en Caroline du Nord) — là bas il est vendu à des millions d’exemplaires, il était introuvable en France depuis presque trente ans ! Les éditions Hors d'atteinte ont donc fait un gros travail de retraduction et de contextualisation, et nous offre enfin la possibilité de se plonger dans la vie et la pensée de Malcolm X, dont on fête cette année les 100 ans de sa naissance.
Ce livre - basé sur plus de 1000 heures d'entretiens avec Alex Haley, journaliste co-auteur - n’est pas seulement instructif sur sa vie ; il nous permet vraiment de comprendre la nature du racisme, de la ségrégation et de la discrimination raciale aux États-unis. Il nous aide aussi à décortiquer les reproches qu'on a beaucoup fait aux Black Panther, celui d'être un mouvement qui a pris les armes — on comprend pourquoi Malcom X s'est engagé et pourquoi il a choisi de créer les Black Panthers et non pas de suivre le Mouvement des Droits Civiques sous l'égide de Martin Luther King.
En ce moment je travaille sur un projet de récit de luttes, ce qui m’amène à me reposer des questions sur le principe de la non-violence et sur ce qui fait que des luttes réussissent ou non. Mais de ça je vous en reparlerai bientôt.
Vous pouvez aussi toujours écouter cette émission de France Culture qui retrace la vie et les combats de Malcom X. Mais quand même… Lisez l’autobiographie. C’est captivant comme un excellent roman, extrêmement instructif sur le racisme, ça changera forcément vos perspectives — surtout si vous êtes blanc·he (j’ai remarqué qu’en tant que blanche je trouvais que j’avais “comme par hasard” souvent mieux à faire que de me plonger dans des bouquins antiracistes — comme les mecs qui ont toujours mieux à faire que lire sur le féminisme…)
A ÉCOUTER - le podcast Délits mineurs
Dans chaque épisode (d’environ 15 minutes), Séverine Kakpo nous plonge dans une audience au tribunal pour enfants de Bobigny, en Seine-Saint-Denis — des mineurs jugés pour des crimes et des délits graves.
Professeure à l’université, elle a choisi d’être assesseure bénévole : elle assiste le ou la juge qui préside l’audience, et dispose d’une voix lors des votes des délibérés…
De sa voix sobre et poignante, elle retrace le procès d’un jeune accusé et partage ses doutes, son raisonnement et les interrogations par lesquels elle passe. Ces instances de justice étant interdites au public et donc très peu représentés dans les médias, ce sont des témoignages rares de parcours de jeunes au sein d’une institution judiciaire débordée. Comprendre comment les décisions sont prises, c'est bouleversant.
J’y apprend un fonctionnement intéressant de la justice des mineurs ; la « période de mise à l’épreuve éducative ». Elle correspond à la période qui se déroule entre l’audience d’examen de la culpabilité et de celle qui prononce la sanction. Dans ce laps de temps il peut se passer entre 6 à 9 mois pendant lequel est mis en place un accompagnement éducatif auprès du jeune, pour lui permettre de s’interroger sur sa responsabilité. En gros la sanction du jugement est donné dans un second temps et est ajusté en fonction du comportement du mineur pendant ces quelques mois.
Mais ce que l’on comprend c’est que partout, le service éducatif est surchargé.
En réalité, la justice manque de tout pour les enfants et aurait besoin de plus de financements pour que les mesures soient réellement exécutées par les éducateurs de la Protection judiciaire de la jeunesse. Afin que les jeunes puissent être protégés et accompagnés correctement, notamment ceux qui seraient eux-mêmes victimes de violences dans leur famille…
La justice pour mineurs a d’ailleurs été récemment la cible de mesures plus répressives les unes que les autres à travers une proposition de loi de Grabriel Attal, adopté au Sénat, qui vise à la durcir. Je trouve qu’en écoutant ce podcast on comprend mieux pourquoi la seule chose sensée à faire, c’est d’augmenter massivement les moyens de cette justice…
➡️ Délits Mineurs, 19 épisodes écrits et incarnés par Séverine Kakpo, sur Arte Radio
A LIRE - “Bonjour Beauté”, une lettre-enquête de Judith Duportail
Journaliste et autrice, Judith Duportail nous écrit de sa belle plume une lettre-enquête qui se lit comme un thriller : elle correspond avec un escroc sur une application de rencontre, comme il en existe des milliers (qui séduisent pour extorquer de l’argent). Elle explique pourquoi leurs techniques sont aussi efficaces, ce que ça raconte de nous (et de l’état de l’hétérosexualité)… De quoi donner envie de vous abonner à sa toujours bien écrite lettre hebdomadaire “Rebelles”.
➡️ “Bonjour Beauté — ce que ma correspondance avec un scameur de Tinder m'a appris sur nous tous.”
… je me sens impuissante face à toutes les nouvelles déprimantes qui nous parviennent. Pour Gaza, je ne peux qu’aller dans la rue manifester (quand il y a des rassemblements…) et donner de l’argent aux ONG, en priant pour qu’enfin Israël accepte d’ouvrir les frontières pour laisser entrer les camions bloqués. Il y a stockés dans les hangars de quoi nourrir toute la population, qui en ce moment même est en train de crever de soif, de faim, de maladie. C’est épouvantable.
Je me sens désespérée qu’il n’y ait pas d’offre politique à la hauteur ni de grand mouvement social dans lequel s’impliquer tout de suite. C’est dérisoire comme réaction, je sais, mais je me réfugie dans l’écoute de la musique. Voici donc une nouvelle playlist, idéale pour les débuts de soirée (j’ai classé les chansons par intensité, pour commencer tout doux et terminer en ondulant des épaules).
Merci de m’avoir lue. N’hésitez pas à me faire part de vos remarques et questions !
Prenez soin de vous, de vos corps et de vos ami·es. A bientôt !
Victoire
Bonjour Victoire,
Je me permets de vous signaler une erreur dans votre présentation de Malcom X : il ne fut pas le leader des Black Panthers. Ils ne se sont même jamais croisés puisqu’il fut assassiné l’année précédant leur création. 😅 C’est à la Nation of Islam qu’il a longtemps appartenu.
J’ai moi même écouté la Grande Traversée qui lui fut consacrée ce mois-ci et que j’ai trouvée en effet passionnante. 👌
Merci pour toutes les reco, Parlement est en attente depuis un moment ds ma liste 😘
Je me permets une petite reco: le film Partir un jour, film musical original avec notamment des tubes de mon adolescence/jeunesse (oui le titre vient bien des 2be3) et c'est touchant, chantant et drôle